Cette expression à l’air anodine et pourtant elle a un sens profond.
Dans la mesure où tout le monde s’assoit , on peut se demander pourquoi le Vénérable Maître ne dit pas tout simplement :
– Asseyez-vous, Mes Frères.
Prendre place n’est pas, stricto-sensu , seulement s’asseoir.
Lors des premiers temps de la Maçonnerie
moderne, avant l’ouverture des travaux, les surveillants n’avaient pas à
vérifier si tout le monde était bien initié ; cela se faisait pendant
la préparation des FF :. sur les parvis, s’il y en avait , ou à
l’intérieur du local servant à les accueillir. Par-contre ils devaient
vérifier, lorsque tout le monde était vêtu, que chacun soit bien à sa
place – c’est-à-dire que les officiers soient au poste correspondant à
leurs offices et que les FF :. soient bien sur la bonne colonne. Ainsi
que le montrent toutes les gravures d’époque , il n’était pas question
de s’asseoir ; tout le monde restait debout hormis le Vénérable Maître
qui était le seul à conserver son épée et son chapeau, et le seul à
être assis **, ainsi qu’il convient à celui qui a été installé dans la
Chaire du roi Salomon.
De nos jours, et dans notre rite aussi, certaines places sont peu déterminées. Le Maître des cérémonies et l’Expert qui n’ont pas de plateaux se trouvent à côté du F :. trésorier pour l’un et en avant du 1er surveillant pour l’autre , ce qui n’est pas exemplaire de précision. De plus, placer le F :.Expert devant le plateau, c’est-à-dire entre le 1er surveillant et le Vénérable ne paraît pas être la meilleure place : dans cette position, il gène la circulation du 1er surveillant lorsque celui-ci se déplace lors de l’ouverture des travaux ; par ailleurs, dans la définition du rôle des surveillants dans l’instruction de l’apprenti , il est écrit :
1. Où se tiennent les Surveillants ?
2. A l’Occident.
3. Pourquoi ?
4. Pour aider le Vénérable Maître dans ses travaux, payer les ouvriers et les renvoyer contents.
En ce qui concerne le F :. de la colonne d’harmonie, il se met où il veut, et plus prosaïquement, de nos jours, à proximité d’une prise électrique pour brancher ses appareils. Mais même ces FF ou SS :. lorsqu’ils ont pris place (leur place) ne peuvent plus en changer au cours de la tenue,
Pour les frères sans emploi, il est constant que les F:. Apprentis sont sur la colonne du Nord et les Compagnons au Sud. Les séances étant considérablement rallongée depuis les origines, on a disposé des chaises dans nos temples ; après l’ouverture des travaux, le Vénérable dira , pour toutes les occasions du rituel :
« Mes FF :. prenez place », car une fois placés – sauf convenances personnelles ou circonstances exceptionnelles, personne ne changera de place pendant la tenue, sauf bien sûr pour les changements de grade.
Si au cours de la cérémonie , tout un chacun doit être à sa place, prendre sa place, retourner à sa place etc…,
Par contre, lors de la phase d’ouverture des travaux, les FF :. présents sont invités à
« prendre séance ».
Prendre séance , consisterait donc à s’asseoir comme l’écrit le vieux Corneille dans Cinna :
« Sieds-toi, je n’ai pas dit encore ce que je veux;
Tu te justifieras après, si tu le peux. »
Mais séant possède une autre signification telle qu’on la trouve dans Hernani
« Il vous sied, mon amie, d’être dans mon malheur, toujours plus raffermie »,
On peut parler également d’un habit séant , d’une coiffure séante.
Il y a plusieurs sens à ce mot issu du verbe « seoir », peu usité de nos jours , et lorsqu’on prend séance cela veut tout à la fois dire, s’asseoir et aussi être dans une vêture et une posture convenable.
Le Littré donne comme définition à séance : acte de celui qui est séant, assistant, présent.
Ces petites réflexions sur deux mots issus de notre rituel français, démontrent bien toute l’importance que nous devons attacher à l’exécution fidèle des textes.
Bien sûr, employer un mot à la place de l’autre ne changerait pas la face du monde. Mais remarquons tout de même que nos anciens les ont choisis avec sagacité, à une époque où la langue française était sûrement mieux parlée et comprise , et surtout moins abâtardie qu’elle ne l’est de nos jours.
Il appartient à tous de bien comprendre le sens profond de nos rituels , et méfions-nous du goût qu’éprouvent certains, pour changer ce qu’ils n’ont pas compris.
Texte extrait du site : www.le-ritdefrance.com
« À vous Maçonnes, Maçons, recherchant l'essence du RITUEL FRANÇAIS »
* Pour des raisons de commodité, seule l’expressions « mes Frères » est employée. Il est bien évident qu’il ne s’agit à aucun moment d’une position sexiste, et que les expressions : « mes Sœurs » ou « Mes Sœurs et mes Frères » ,ou « mes Frères et mes Sœurs » seraient toutes aussi bien justifiées.
** Sur certaines gravures le Vénérable est debout, sans chaise pour s’asseoir pour lui non plus.
Il fut reçu Franc-maçon au sein de la Loge « La Clémente Amitié » du
GODF le 8 juillet 1875. On lui doit l’orientation positiviste de cette
Obédience.
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