Je suis toujours ému aux manifestations et évocations de la mémoire d’un disparu, célèbre ou anonyme. Paradoxalement, je m’insurge sur les larmes de crocodile et la fausse compassion qu’affichent certains lors de l’agonie d’un proche ou d’un ami. C’est du vivant de l’homme que l’on doit lui exprimer ses sentiments, lui apporter le soutien et l’aide dans l’adversité. Arrivé à un âge où ayant assisté à nombre de scènes du genre, je redouble d’attention à réveiller le souvenir de ceux qui nous ont précédés et qui ont marqué la vie de leur empreinte, familiale, amicale ou publique. Combien de fois me suis-je dit à propos de mon Grand-père « Qui aujourd’hui pense encore à toi, t’adresse une pensée d’amour, une prière d’intercession ? » et qui le fera demain lorsque devenu plusieurs fois arrière grand-père, sa case s’estompera sur l’arbre généalogique ? Sa vie était aussi riche que la mienne, les événements aussi importants, son travail aussi utile et c’est grâce à lui je suis là aujourd’hui à écrire ce billet d’humeur. C’est un faux retranchement, pour se justifier, que de prétendre vouloir « réussir au plus vite son deuil » ou répliquer que « c’est le cycle naturel de la vie ». La vie, c’est toujours plus important que la mort – je ne place évidemment pas mon propos au niveau de la croyance religieuse – parce que c’est maintenant que l’on donne et que l’on reçoit, que l’on partage réjouissances ou épreuves, que l’on révèle ses traits de caractère, ses valeurs, et parfois aussi ses talents particuliers.
De l’amitié, s’impose la même exigence. Il y a les amis, et puis, mes Amis. Je n’évoquerai que ceux-là ! On ne se déclare pas l’ami de quelqu’un, pas davantage quelqu’un peut me répudier en déclarant « tu n’es plus mon ami ». C'est sa liberté de le proclamer, moi je suis libre de le considérer toujours comme tel, son excommunication ne m'est pas opposable. L’amitié est un sentiment porté à son prochain, sentiment partagé ou non. C’est ce qui permet d’avoir un ami… qui ne le sait même pas, de son vivant ou pas (voire même post-mortem d’un siècle ou deux). Ce sont les singularités d’autrui, ses traits particuliers et les points communs identifiés qui vont provoquer la symbiose, et tant mieux si elle se matérialise par une manifestation que je qualifierais de physique !
C’est ainsi que je puis prétendre que Louis-Claude de Saint-Martin est mon ami, sans revendiquer que je suis le sien. « Facile me répondrez-vous, il est mort il y a deux siècles ! Il ne peut ni infirmer ni affirmer votre propos ». Je pourrai engager ici une objection philosophique, aussi répliquerai-je pour le moment, qu’il m’eut été plus aisé pour convaincre, de vous citer un contemporain, célèbre ou non…
Saint-Martin eut un ami, Kirchberger baron de Liebistorf. Il s’ensuivit une correspondance riche et volumineuse et qui laisse pantois le chercheur lorsqu’il découvre que ne se sont jamais rencontrés !
Je vous suis sur les disparus, mais je vous trouve un peu... "candide" sur l'amitié, je crois moi que c'est du "consommable", que l'on se fait beaucoup d'illusions, que nous n'avons en réalité peu ou pas du tout d'amis !
RépondreSupprimerJe ne suis pas d'accord, bien entendu, et votre commentaire m'arrive le même jour qu'un "petit-mot" d'un ami, enfin, de quelqu'un que je considère comme tel suivant votre avis, et qui me prévient que "l'amitié, ce n'est pas un contrat à vie". Curieux, mais bon...
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